Le grand retour

26 juillet 2013

Le grand retour

Je rigole un peu, vous vous en doutez, quand je parle d’un grand retour sur Montréal Anyways, après deux mois d’inactivité. Je dis bien sur Montréal Anyways parce que j’ai loin d’avoir été inactif en général. J’ai même rarement été aussi actif, et vraiment, j’ai voyagé dans trois pays (Pologne, deux fois, Italie, République Tchèque), j’ai déménagé à trois rues de mon ancien appart mais quand même, et puis jai lu… beaucoup, dans des livres un peu et dans moi-même surtout.

Mais ça, ça ne vous concerne pas.

Ce qui vous concerne, c’est pourquoi pendant deux mois, j’ai aussi était des tas de trucs (y compris une dizaine d »articles pour Montréal Anyways) que j’ai finalement décidé de ne pas publier ici au grand desespoir de mes cinq lecteurs attentifs (mais puisqu’ils sont attentifs ce n’est vraiment pas ça, je veux dire, mon impopularité, la raison). Et puis, je vous explique aussi ce que j’entends pas mon «grand retour», mais à la fin seulement, parce que je veux m’assurer que vous lisiez tout ca bien bien.

Alors par où commencer?

Eh bien voilà: peut-être par l’analyse de cette petite phrase: «Alors par où commencer?»

Non, mais c’est pas banal. Ça veut pas juste dire: laissez moi deux minutes pour structurer mon histoire afin de la rendre la plus divertissante et pertinente au plus grand nombre, en gros le plus littéraire possible. Oui, ça pose la question de ce que c’est qu’une histoire «littéraire» (si vous voulez une «bonne» histoire) et une histoire qui n’intéresse personne. Mais quand on dit: «Alors par où commencer? », on ne se pose pas qu’une question (relativement interessante) de forme, c’est-à-dire de style, mais on se pose surtout le «alors». Tout est dans le «alors» je vous explique.

«Alors», c’est pour faire court «ad illam horam», ce qui signifie en latin: «à cette heure», qu’on dit encore tout le temps au Québec (je ne sais pas en France) sous la forme machée et remachée «astheure», ce qui veut dire en gros «désormais». Ah! «désormais»: quel joli mot, non? Dès-or-mais, ça veut dire : «(mais) à partir de maintenant»: voyez, il y a «dès» dans le sens de «à partir», il y a «or», de «hac hora» (à cette heure, encore), et n’oublions surtout pas le «mais». Il y a dans «désormais» cette idée d’opposition, c’est-à-dire, «mauvaise direction les gars, on s’excuse, on rechecke la mappe et on repart». «Désormais», c’était même le slogan initial de la Révolution tranquille qui a (supposément) sorti le Québec de sa torpeur en 1960. Mais je suis pas historien.

Anyways, si je vous parle de «désormais», c’est parce que c’est un peu ça que j’ai vécu récemment: une révolution tranquille (enfin quasiment tranquille). Le jour de mon anniversaire (voyez mon billet précédent), je me suis dit: «Ça va pas» et puis je me suis auto-pardonné, j’ai rechecké ma «mappe» intérieure, et je me suis dit: «Alors par où commencer?»

En fait, j’ai cherché, comme les Québécois en 1960, j’ai essayé des trucs, comme je vous ai dit: voyages, déménagement, et d’autres trucs que je garde pour moi, et puis j’ai compris un truc: la bonne question est plutôt « alors par ou (re)commencer? ». Et la réponse est évidente: par le commencement. Au Québec, c’était le retour à l’esprit frondeur des patriotes des 1830s, qu’on avait oublie sauf dans nos sacres. Mais ça fonctionne aussi individuellement, parce qu’on a déjà connu le bonheur, enfin, le vrai bonheur, en très bas âge, et on ne s’en souvient même plus, consciemment, parce que justement on n’était pas encore tout à fait conscient.

Et puis c’est ça que j’ai compris en gros: la vie c’est pas joli joli quand on y pense, mais quand on y pense pas, c’est pas si mal.

Voilà: je vous parle pas de Nietzsche et de tout le tralala, mais un court-docu à voir absolument, de Kieslowski que Manon aime tant. Ça s’appelle « têtes parlantes » et c’est pas un hasard si c’est un polonais qui l’a realisé. C’est cet esprit slave, froid, mais vrai, pas si désespéré qu’on le dit, qui est si beau (réécoutez Chopin pour voir) et qui a même fait fabulé à Nietzsche des origines polonaises, lui qui écrivait que « l’Allemagne est un grand pays seulement parce que ses habitants ont tellement de sang polonais dans leur veine… Je suis fier de mes origines polonaises. Je me souviens que, dans les temps anciens, un noble polonais, par son simple veto, pouvait contrecarrer la résolution d’une assemblée populaire. Il y avait des géants en Pologne (1) au temps de mes ancêtres. » Et pas juste des géants, il y a aussi là-bas des «des écureuils à petites oreilles, à abajoues et dont la queue est assez courte et plus ou moins fournie» qu’on appelle les spermophilus suslicus !

Bon.

Pas très démocratique le Nietzsche, mais d’une certaine manière si, c’est-à-dire que pour lui, le bonheur c’est une affaire pour tous, et même pas nécessairement des «privilégiés».

Lisez ou relisez «Ainsi parlait Zarathoustra».

«Je vais vous dire trois métamorphoses de l’esprit : comment l’esprit devient chameau, comment le chameau devient lion, et comment enfin le lion devient enfant.»

C’est ça le «grand retour».

P.S. Désormais, sur ce blogue «journalistique», je ferais ce qu’on attend de moi: je parlerais des scandales politiques au Québec, cette «fausse alerte permanente», mais à la manière du 19e siècle, parce qu’«encore un siècle de journalisme, et tous les mots pueront», disait un mort-vivant en 1882. Et qui vient 100 ans après? Moi!

 

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Commentaires

serge
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heureux de te retrouver.. j'espere que tu écriras plus souvent ... sans pression heim... si je ne me trompe pas , la derniére fois qu'on s'est parlé t'avais pas lu zaratoustra...
comme tu aimes tant Nietzsche, peut être que tu sauras digerer Peter Sloterdijk ;)

on attend les grands retournements de la vie politique québécoise...