Le Juif

Article : Le Juif
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5 octobre 2012

Le Juif

«À mi-chemin entre l’Amérique et l’Europe.» C’est ainsi que les visiteurs à court et moyen terme décrivent le plus souvent Montréal. Ne les écoutez pas.

Leonard Cohen en concert à Montréal en 1970 (crédit photo: Peter Brosseau)

Ceux qui mettent les pieds à Montréal, se remettant à peine d’un torticoli provoqué par une scéance photo frénétique avec nos gratte-ciel à la new-yorkaise, sont tellement émus par la poésie de nos escaliers extérieurs qu’ils perdent parfois le Nord et se mettent à en parler en des termes géographiquement douteux. Calmez vous : Montréal n’est pas l’Atlantide!

Montréal n’est rien d’autre qu’une ville typique d’Amérique du Nord, à moitié francophone, à moitié anglophone, certes, mais tout aussi américaine que n’importe quelle autre, et tout aussi européenne d’ailleurs, puisque nos Montrealers, ils viennent d’où, vous pensez?

Bien sûr, elle a un petit côté «bohème» qui rappelle le Vieux Continent; mais, si on le doit à de grands poètes canadiens-français (Nelligan, Miron), de grands chansonniers aussi (Leclerc, Ferland), quelques cinéastes pas trop mal (Jutra, Arcand), et autres peintres de génie (Borduas, Riopelle), les anglos y ont contribué à parts égales: d’Oscar Peterson à Arcade Fire, en passant par Mordecai Richler, l’écrivain, et Leonard Cohen, qui est né sur le versant ouest du Mont Royal et qu’on croise encore parfois dans nos rues enneigées (même si on dit qu’il réside à L.A. depuis un certain nombre d’années).

Ah… Leonard Cohen! Je visionnais récemment un documentaire dans lequel on le voit errer magnifiquement dans le Montréal des années soixante. En noir et blanc, en plus! Il y fait cette réflexion magnifique qui est – je m’en excuse – le seul adjectif qui me vienne en tête encore une fois: «When I get up in the morning, my real concern is to discover whether I’m in a state of grace. And if I make that investigation, and I discover that I am not in a state of grace, I try to go back to bed.»

Et quand je dis qu’on le rencontre encore de temps en temps, j’exclus par ce «on» la personne qui parle, puisqu’en fait, je n’ai jamais eu, moi, contrairement à plusieurs de mes amis, la chance de le croiser et de le saluer timidement comme il se doit.

C’est l’un de mes plus grands malheurs et j’ai décidé que ce serait mon objectif premier durant les quelques prochains mois. Entamant le dernier droit de mes études en journalisme, qui sait où je travaillerai l’an prochain? Berlin? Rio? Oulan-Bator? Loin, loin, du «Master of Erotic Despair» comme les Anglais le surnomment. Le temps court. C’est peut-être ma dernière chance.

Ainsi, comme un Albert Londres qui marcha sur les traces du peuple juif dans Le Juif errant est arrivé, je marcherai sur les traces d’un seul Juif – je suis moins ambitieux – , mais non le moindre.

Parce que Montréal, ce n’est ni l’Europe (du tout), ni (vraiment) l’Amérique.

C’est Leonard Cohen.

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Commentaires

Manon
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Il lit le Francais, Cohen?
I should try to go back to bed.
Chouette premier article. Ca promet. (y a pas de cédille sur ce clavier deutsch).

Nicolas Dagenais
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Bien sûr! Et il chante en Français aussi. Tiens, le voilà qui interprète «La Complainte du partisan» pour la télé française: https://www.youtube.com/watch?v=x_223jKXKgQ

aurora
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" Québécoisement rafraichissant !" (>_0)